Plus ancien club de la région, le golf de Reims attire les joueurs depuis 1928. Dans un parc arboré, le tracé porté à 18 trous en 1973 ne manque pas de relief même si l’apparence est trompeuse. Les petits greens se méritent avant que les birdies ne soient arrosés comme il se doit… À l’eau de Reims, bien sûr !
Par Claude Granveaud-Vallat
Durant longtemps, le golf de Reims s’est senti bien seul entre l’Île-de-France et la Lorraine. Les immenses plaines champenoises, mises à l’honneur du souvenir en ces années du centenaire de la Première guerre mondiale, ont plus souvent séduit les vignerons que les golfeurs… En 1928, quelques amis champenois ont proposé à l’illustre Tom Simpson de dessiner 9 trous dans le parc du château des Dames de France, les filles du roi Louis XV qui séjournaient sur ces terres, en route vers le château de La Bove qui accueillait souvent les princesses. Entre la pièce d’eau reliée aux douves du château, les immenses futaies et une plaine ondulée, l’illustre architecte anglais trouva facilement l’inspiration à son dessin. Fut-il aidé par quelques coupes de vin pétillant ? Son talent n’en avait pas besoin même si son savoir-vivre l’empêchait de refuser… Avec ses 9 trous longs de 2450 mètres, le club vécut tranquillement jusqu’aux années 70, époque où le président Charles-Henri Heidsieck – propriétaire de la maison de champagne éponyme – décida d’agrandir la propriété en acquérant quelques hectares de forêt de l’autre côté de la route qui allaient permettre de porter le tracé à 18 trous. En 1973, le nouveau parcours – conservant quatre trous d’origine (1, 2, 17 et 18) – signé Michael Fenn était inauguré avec un dessin harmonieux, alternant des trous longs, en dévers, en montée avec d’autres dessins plus courts, plus techniques où les bunkers entrent vite en jeu. Une fois la route traversée, le parcours respire mieux, prend ses aises, les trous disposent de plus d’espace même si le jeu demeure précis, serré. Sur un sol souvent gras durant les mois en « R », les petits greens surélevés favorisant un meilleur drainage demandent une certaine habileté pour aller chercher les drapeaux. Michael Fenn a dû s’inspirer du travail de Simpson pour poser ses bunkers de façon judicieuse, ils attirent les balles comme un aimant l’acier !
Depuis le début de ce siècle, une volonté d’améliorer la qualité du terrain a été mise en place à grands frais par Éric Censier, l’ancien directeur. Éric Moreul qui vient de lui succéder compte bien insister dans ce sens. Suite aux fortes chaleurs de l’été 2015, l’arrosage automatique a montré ses limites, la densité forestière pompant plus d’ea
u que les fairways. Une politique d’abattage raisonné est mise en place sur cinq ans pour aérer le parcours, lui apporter plus de lumière et faciliter le jeu. Il y a quelques années les contours du green du 9 ont été repensés avec la création d’une pièce d’eau sur ce dogleg assez court où les fier-à-bras avaient tendance à survoler les frondaisons vers le green et l’espoir d’un eagle. Désormais ils se sont calmés et la grosse artillerie est rangée au fond du sac ! Mais ce trou demeure la hantise de bien des joueurs qui ont tendance à s’enfermer à droite au milieu des petits arbres, se privant d’un accès au green sans risque. Les piquets rouges ne sont alors jamais loin… Derrière grimpette, la mise en jeu du 16 demande encore un petit effort d’autant que si la balle n’atteint pas le plateau le deuxième coup de ce par 5 devient aveugle face à un fairway légèrement incurvé vers la gauche. A l’approche du green, une petite pièce d’eau en forme de haricot sépare ce trou du départ du 3 adjacent avec les risques que cela implique. En revenant vers le château, on retrouve une certaine majesté dans la clairière où l’on imagine les princesses royales jouant à colin-maillard derrière les grands chênes… En léger dévers courant vers l’eau, la mise en jeu du 18 a belle allure. Attention aux piquets rouges sur la droite à la chute de drive, ils arrivent vite si on dévisse. Au deuxième coup, logiquement, l’étang n’est pas dans la ligne de jeu. Il permet juste aux tourelles du château de se refléter dans l’eau pour le plaisir des esthètes et des photographes !
Propriété de ses membres et de 18 grandes maisons de Champagne dont les caisses estampillées ornent le bar, le club pense déjà à son centenaire qui pointe au bout du chemin. 2028, c’est demain… Dans ce sens et aidé par les banques, il compte intensifier les améliorations tant sur le terrain qu’au sein du club-house et au practice pour s’offrir un nouvel élan de jeunesse et attirer une clientèle qui vient à Reims sans forcément passer par le golf. Si chaque trou arbore le nom d’une maison de Champagne – partenaire du club -, leur attribution est tirée au sort chaque année pour éviter un quelconque favoritisme même si les bulles se mélangent naturellement dès que l’on pousse la porte du château. A table, la carte est adaptée aux attentes des joueurs, des plats simples et copieux avec quelques suggestions plus sophistiquées qui font le bonheur des gourmets. Ici le golf se consomme sans modération tout comme les bulles qui ne sont jamais loin du parcours…
Informations pratiques
Golf de Reims
Château des Dames de France – 51390 Gueux
Tél. : 03 26 05 46 10.
Email : golf-de-reims-sa@wanadoo.fr
Site : www.golf-de-reims.com
Architectes : Tom Simpson (1928), Michael Fenn (1973).
18T, 6055 mètres, par 72.
POUR ALLER PLUS LOIN…
Question de stratégie
Le trou 18, par 4 de 379 mètres (jaunes), par Éric Moreul, pro à Reims.
Dessiné dans la perspective du château, le 18 a une élégance naturelle. Un atout qui ne suffit pas forcément à en maîtriser toutes les subtilités. Au départ, mieux vaut viser à gauche du fairway pour éviter la pièce d’eau de droite considérée comme hors-limites. Pas question de dropper au bord de l’eau en cas de plongeon forcé ! Le dévers du terrain ramène la balle vers la droite, laissant logiquement un fer entre 5 et 7 au 2e coup. La seconde pièce d’eau où se reflète le château n’est pas vraiment en jeu, le green étant légèrement désaxé sur la gauche. Au cas où une balle serait attirée par l’eau, deux bunkers sur la droite d’un green légèrement bombé la protègent du bain. Deux putts plus tard, il est temps de rejoindre le 19e trou qui, à Reims plus qu’ailleurs encore, fait partie intégrante du parcours !
En Champagne…
Surnommée la « cité des sacres », Reims a consacré de nombreux rois de France en sa cathédrale Notre-Dame. Rendue célèbre par Jeanne d’Arc qui y a porté Charles VII jusqu’au trône en 1429. En 1825, Charles X fut le dernier monarque à être acclamé sur le parvis de la cathédrale. Depuis le XIXe siècle, la ville prospère au rythme de ses maisons de champagne. Les façades des hôtels particuliers sont à leur image, riches… Nombre d’entre elles se visitent, surtout leurs caves installées dans les fameuses crayères, ces galeries souterraines taillées dans la pierre et offrant une température constante à l’année (env. 12°) idéale à la maturation des précieux flacons. De quoi mieux comprendre l’élaboration de ce vin pétillant imaginé au XVIIe siècle par le moine Dom Pérignon et qui nous enchante à chaque fois qu’un bouchon saute en l’honneur d’un birdie…