Un palmarès époustouflant, dix-huit victoires majeures entre 1962 et 1986, Jack Nicklaus demeure la référence du golf moderne là où ses rivaux ont également brillé et où d’autres rêvent d’atteindre ce tableau de chasse. À soixante-quatorze ans, « The Golden Bear » a raccroché le gant, se consacrant à l’architecture de parcours tout en profitant de la vie de famille.
Par Claude Granveaud-Vallat

Nicklaus au Masters 1986
Les sports ont toujours été portés par des champions, des leaders capables de transcender les foules comme de motiver l’adversité. Au golf, un sport où la première compétition – le British Open – remonte à 1860, le public vibra tout d’abord pour les Vardon, Braid et Taylor, le fameux Grand Triumvirat du début du XXe siècle. Puis ce furent l’amateur Bobby Jones, Walter Hagen et Gene Sarazen qui firent trembler les foules dans les années 20-30 avant que Jack Nicklaus, Arnold Palmer et Gary Player ne déclenchent l’engouement derrière les cordes au début des années soixante. Un blondinet un peu rondouillard débarqué de son Ohio natal, avec déjà un beau palmarès amateur en poche (vainqueur de l’US Amateur 1959 et 1961), passe pro à l’orée de la saison 1962. Dès cet été, en Pennsylvanie, il inaugure son palmarès et remporte l’US Open, son premier Majeur, en battant Arnold Palmer en play-off. Un peu plus âgé, Palmer sévit déjà depuis plusieurs années, entraînant derrière lui l’Arnie’s Army, une horde de fans totalement acquis à la belle gueule du golf moderne. Alors lorsque Nicklaus met son swing en travers de la voie du héros national, c’est toute l’Amérique qui tousse. À ce jeu-là, elle va bientôt s’enrhumer ! Avec deux autres victoires en 1962, il termine à la 3e place de l’ordre du Mérite (le classement des gains). L’année suivante, il s’impose au Masters et lors de l’USPGA Championship, le dernier majeur de la saison. Au fil des saisons, les victoires s’enchaînent, tout comme les records tandis que sa rivalité avec Palmer et le Sud-Africain Player permet de médiatiser le golf sur les petits écrans américains. En 1966, c’est au British Open qu’il soulève le trophée, la fameuse Claret Jug, établissant dès lors le « Jack Slam » avec les quatre Majeurs en poche, rejoignant Gene Sarazen, Ben Hogan et Gary Player dans ce club très fermé de l’élite du golf mondial. Plus tard et à ce jour, seul Tiger Woods est parvenu à pousser la porte de ce cercle d’initiés.

Gary Player, Jack Nicklaus et Arnold Palmer au Texas en 2010
Les années passent et le palmarès du Golden Bear s’étoffe. Ce surnom lui est venu de la couleur de sa chevelure et d’un ours, emblème de l’Upper Arlington High School, l’université de l’Ohio où il vécut ses plus belles années de jeunesse. Avec les années 70, de nouveaux noms vont venir chatouiller celui que l’Amérique a fini par adopter même si Palmer demeure sur son piédestal. Lee Trevino, Johnny Miller et surtout Tom Watson, de nouveaux empêcheurs de truster les victoires pour ce boulimique du podium. En 1977, Nicklaus s’est incliné devant Watson lors du Masters. L’heure de la revanche à sonner sur la côte écossaise battue par les vents lors du British Open. Au prix de scores incroyables dans ces conditions, les deux hommes offrent un spectacle éblouissant. 65-66 pour Nicklaus et 65-65 pour Watson lors des deux derniers tours, l’Ours blond s’incline une seconde fois en 100 jours mais ce duel homérique fait toujours débat dans les pubs écossais près de quarante ans plus tard. En 1982, c’est à l’US Open que l’affaire se reproduit du côté de Pebble Beach avec, entre autres, ce chip dominical de Watson au bord du green du 17 pour la victoire. Si on doit se souvenir d’une victoire majeure de Jack Nicklaus alors que ce soit la dernière, celle du Masters 1986 où, au prix d’une charge héroïque, l’Américain est allé arracher le veste verte des épaules de Greg Norman qui se voyait déjà l’endosser. Avec six birdies et un eagle sur les 9 derniers trous d’Augusta pour une carte de 65, à 46 ans, la peau de l’ours est tannée mais la bête est vaillante. Au prix de drives surpuissants et d’un putting diabolique, il décroche là sa 18e victoire majeure (6 Masters, 4 US Open, 3 British Open et 5 PGA Championship), la dernière d’une carrière qui le vit également terminer 19 fois à la deuxième place d’un Majeur tandis qu’il s’est imposé à 113 reprises à travers le monde (73 victoires sur le PGA Tour). Sans oublier six sélections en Ryder Cup où il n’a jamais vu l’Amérique perdre. Il en fut autrement lors de son second capitanat, en 1987 sur ses terres de Muirfield Village, avec la première victoire européenne sur le sol américain

Nicklaus et Woods, vainqueur du Memorial Tournament at Muirfield, Ohio, le parcours de JN
en soixante ans. Après quelques années passées sur le Senior Tour où il ne céda jamais sa part aux chiens, Jack Nicklaus s’est définitivement tourné vers sa seconde passion, l’architecture de golf, un domaine où il excelle aussi. Aujourd’hui Jack Nicklaus Design revendique plus de 380 parcours sur les cinq continents, dans 36 pays et 39 états américains, sans oublier une cinquantaine de projets en cours de réalisation… À l’heure où on peut légitimement se poser des questions sur l’avenir sportif de Tiger Woods, dans la jungle du golf, l’Ours serait-il plus fort que le Tigre ?
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